Je n’aime pas les phénomènes de mode et cette manie de nos sociétés de vouloir toujours tout étiqueter et ranger dans des catégories. Mais s’il y a une tendance qui me rejoint et me correspond, et ce déjà avant qu’elle soit nommée dans les médias, c’est bien le slow travel qui va à l’encontre du tourisme de masse. Voyager lentement, voilà comment j’entrevois chacun de mes périples. Une philosophie dont j’ai envie de vous parler plus en détail.
Gagner ou perdre son temps
Nous sommes tous confrontés à ce temps qui passe beaucoup trop vite, ce temps qui nous est compté et qu’on tente sans cesse d’étirer. Notre vie, on veut la vivre à fond en profitant de chaque instant. On la surcharge donc en la remplissant de mille et une activités, simplement pour se sentir vivant. C’est alors tout l’inverse qui se produit : on n’a plus le temps de faire quoi que ce soit et on court comme une poule sans tête vers nulle part.
Avec la vitesse, nous savons peut-être ce que nous avons gagné, en temps et en argent surtout, mais nous ne savons pas encore tout ce que nous avons perdu.
-Franck Michel, Voyage au bout de la route
C’est la même chose en voyage, on veut rentabiliser au maximum une journée. On finit plutôt par la gaspiller. Une course constante contre la montre qui nous laisse avec un grand sentiment de vide. Une impression tellement désagréable que j’essaie de ne plus avoir en faisant tout l’opposé. Voyager lentement, ralentir le rythme, comprendre que l’on ne peut pas tout voir en faisant des choix pour au contraire s’ouvrir à un univers de possibilités insoupçonnées.
Un cheminement avec l’âge
Tant de fois j’ai été frustrée en me retrouvant dans un lieu sachant que je devais le quitter pour me rendre à un autre. Tant de fois j’ai regretté d’avoir pris trop d’engagements alors que j’aurais pu les limiter et m’éviter une dose inutile de stress. En voyage, comme dans la vie quotidienne, on apprend de ses essais et erreurs pour trouver un juste équilibre. J’ai compris que le mien n’était pas dans la vitesse et la surconsommation. Je suis heureuse en prenant mon temps et voyager lentement est un cheminement qui m’est venu avec l’âge. Car on ne voyage pas de la même manière selon notre vécu. Le slow travel c’est ça aussi ; être à l’écoute de soi-même et tirer des leçons du passé.


Vivre calmement une journée de loisirs, c’est être immortel une journée durant.
–Proverbe chilien
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Le bonheur n’est pas une destination, mais une manière de voyager.
-Proverbe brésilien

La qualité de l’expérience
Du coup, au lieu d’accumuler les destinations, je choisis d’en découvrir quelques-unes en profondeur. L’idée est de revoir son planning à la baisse en se laissant porter par le voyage et ses envies. J’aime ainsi retourner vers mes coups de cœur et rester un long moment au même endroit. Ce n’est pas que d’autres coins du globe ne m’intéressent pas. Je préfère tout simplement privilégier la qualité d’une expérience en optimisant mes découvertes. Vivre vraiment chacune d’entre elles en laissant la place à la spontanéité. Ne pas simplement survoler une destination pour la rayer de sa “bucket list” ou par esprit de compétition. Ne pas non plus choisir celle-ci parce qu’elle est à la mode.
L’homme qui regarde l’horizon ne voit pas la prairie devant lui.
-Proverbe amérindien
Dans une ville, faire le choix de visiter un seul quartier en prenant mon temps, flâner dans ses rues et découvrir ses belles adresses. Ne pas me presser, ne pas me dire que je pourrais en faire plus. Goûter à l’instant présent, savourer ces moments, pour s’imprégner réellement d’un lieu. À la campagne, me poser devant un paysage qui me séduit. Ne pas chercher à en trouver un encore plus beau. Savoir apprécier ce qui se présente sur ma route.
Un éloge de la lenteur en voyage
“Qui va doucement, va sûrement”. Vous connaissez sûrement l’expression. Au-delà de ralentir le rythme, voyager lentement se traduit par une série de choix qui vont jusqu’au mode de transport. Pour moi, rien de mieux que la marche qui me permet de m’imprégner d’un lieu. Pour les longues distances, le train donne tout le loisir à mon esprit de vagabonder en contemplant les paysages sur la route.
La lenteur ne signifie pas l’incapacité d’adopter une cadence plus rapide. Elle se reconnait à la volonté de ne pas brusquer le temps, de ne pas se laisser bousculer par lui, mais aussi d’augmenter notre capacité d’accueillir le monde et de ne pas nous oublier en chemin.
-Pierre Sansot, Du bon usage de la lenteur
Alors que d’autres voyageurs auraient choisi l’avion pour relier deux lieux, je n’ai jamais considéré les longs déplacements en train comme une perte de temps. Ils font plutôt partie pour moi du périple et m’obligent à m’arrêter et me retrouver. Parfait pour relaxer, le train a en plus une faible incidence écologique. Car au-delà des bienfaits de réduire la cadence, le slow travel, comme tout le mouvement slow (slow food, slow media, slow education, etc.) s’inscrit dans une volonté de préserver l’environnement et d’encourager les traditions locales.
Et si pour certains, voyager lentement n’est qu’une douce parenthèse dans leurs vies trépidantes, cette philosophie n’a de sens pour moi que dans une conception plus globale de l’existence. Dans un monde où être débordé est synonyme de succès, ralentir la cadence demeure peut-être un choix à contre-courant, mais à mon avis essentiel pour apprécier pleinement l’expérience du voyage et surtout la vie, en général !
Crédit photo : Une Porte Sur Deux Continents
Je partage absolument ton point de vue ! Combien de fois ai-je regretté de devoir partir sans pouvoir approfondir une visite. Parfois je me dis que j’ai survolé le monde ! Le train est une excellente solution qui permet de goûter aux paysages traversés ! L’idéal est de pouvoir s’arrêter pour comprendre le mode de vie sur les terres lointaines ! Les vacances sont si courtes ! Je te souhaite un très joyeux anniversaire 🙂 Gros bisous
Merci ma chère Paulette ! ♥ Oui, comprendre la culture et le mode de vie de l’endroit visité fait partie de l’expérience. S’adapter à son rythme de vie aussi. On en sort bien plus enrichi. Gros bisous
Un article qui nous parle beaucoup. Mais comme vous dites, cette prise de conscience vient avec l’âge, parce qu’on a envie d’approfondir les choses.
Mais lorsque l’on part très loin, on se dit que l’on reviendra sûrement pas, alors on veut profiter au maximum, la curiosité l’emporte. C’est vrai, en prenant le train ou la voiture, on a le temps d’observer. Lorsque nous étions en Thaïlande, nous avons fait le trajet du sud vers le nord en voiture, avoir un chauffeur nous a permis de regarder et de ce trajet nous gardons un excellent souvenir !
On ne voyage pas de la même façon selon l’âge. Notre expérience nous apprend beaucoup. C’est vrai que la soif de découvertes nous rend gourmand. Difficile de se retenir, de s’empêcher d’avancer d’un point à l’autre quand une destination nous plait vraiment.
Pas toujours facile à faire. Personnellement, dans mes voyages, je me garde des jours off pour prendre le temps de ne rien faire ou faire des choses que les guides ne parlent pas.
C’est important de toujours se laisser une flexibilité.
Un très bel article (superbement illustré) et plein de sagesse ! Pour avoir eu la chance de passer 6 mois en Asie, j’ai vraiment eu la chance de pouvoir savourer plusieurs destinations à mon rythme sans pression de tout vouloir voir et faire. Chaque jour qui passe me donne envie de recommencer 🙂
Des bisous !
Merci Midori ! Très heureuse que tu te retrouves dans mon article. J’imagine ; c’est le mieux découvrir un endroit sans pression et selon ses envies. Avoir du temps devant soi aide justement à prendre son temps, mais je suis convaincue qu’en même une seule journée, on peut pratiquer le slow travel aussi. Bisous
Ton article fait totalement écho aux discussions que j’ai avec ma femme sur notre mode de vie. Nous voulons être partout à la fois, sans perdre de temps et profiter de tout et tout le monde. Avant j’étais trop tout feu tout flamme, je voulais toujours en voir le maximum pour ne pas être frustré. Aujourd’hui je ne pense plus fonctionner de la même manière, notamment car ma moitié m’a souvent dit “OK arrête-toi. Regarde autour de toi, profite et vis vraiment le moment.
Cet été nous sommes allés au château du Neuschwanstein, après avoir lu des conseils et nous être entretenus avec notre hôte dans la pension où nous séjournions, nous avons décidé de ne pas visiter ce “must” en Allemagne, mais de privilégier une découverte de la région avec un petit parcours itinérant sur une journée. Même si elle a été dense, nous sommes allés à notre rythme en prenant le temps de nous poser, notamment au bord d’un lac pour se baigner. Justement nous ne l’avions pas prévu, c’est tout ce qui fait le charme. Au final c’est la plus belle journée de nos vacances en Allemagne. Nous avons également décider de passer moins de temps en ville dans nos vacances futures. A la campagne, les rythmes sont différents, où que l’on soit sur terre. Bien évidemment je ne crache pas sur une escapade urbaine.
J’ai beaucoup apprécié tes citations surtout le proverbe amérindien “L’homme qui regarde l’horizon ne voit pas la prairie devant lui.” Je ressens souvent cela quand je vais voir d’autres blogs, parfois j’ai l’impression que c’est à celui qui sera allé le plus loin, vu le plus de choses originales. Je me dit qu’il faut juste faire une heure en voiture ou en train pour être totalement dépaysé. Ma moitié qui n’est pas très emballée par l’avion est ravie du train également. Moi c’est mon moyen de transport favori. Mon but est de la faire plier et de partir à Moscou en train. 🙂 Belle fin de semaine à toi et merci pour ces pensées intéressantes et tout simplement belles.
Je te remercie à mon tour pour ton beau témoignage. Je suis heureuse que mon article te parle et ton expérience résume tellement bien comment le slow travel laisse justement la place à l’improvisation et permet de sortir des sentiers battus. Tu as bien raison aussi de dire que le rythme est différent à la campagne. Comme toi, même si j’adore les villes et que je suis urbaine avant tout, il faut arriver à se sortir de cette vie effrénée pour souffler et voir les choses autrement. Finalement, je te rejoins également pour la blogosphère voyage. J’ai aussi l’impression que beaucoup de blogueurs voyagent sans être véritablement “connectés” à leur périple, seulement pour rayer une destination de leur bucket list. Paradoxalement, ils sont connectés autrement avec le Smartphone. C’est à qui aura le plus de likes, followers, etc, peu importe s’ils n’ont que survoler un lieu et poser stratégiquement devant. On y échappe pas quand on tient un blog, mais il y a moyen de prendre du recul et de s’extirper de cette course sans fin qui ne mène à rien de bon. Ça serait génial si tu arrivais à convaincre ta moitié de faire ce périple jusqu’à Moscou. Du coup, tu me tentes à mon tour ! Je te souhaite de très beaux voyages ! Belle fin de semaine à toi aussi ! Au plaisir de te lire 🙂
Très jolie chronique ! Je pense qu’il faut avoir connu la frénésie d’un voyage sans queue ni tête pour apprécier de voyager lentement. Après plusieurs voyages à essayer de tout voir sans profiter de rien avant 25 ans, j’ai décidé de lever le pied… Ça fait presque dix ans, et j’apprends à ralentir encore à chaque voyage. Il faut accepter qu’on ne verra de toute façon pas tout… et qu’il vaut mieux voir “bien” que voir “tout” (ou “trop”).
Pour mon prochain voyage (une semaine au Mexique), je suis en train de faire une croix sur un site que j’adorerais visiter, mais qui nous pousserait à passer bien trop de temps sur la route. Tant pis ! À la place de dizaines d’heures de car, nous flânerons dans des cafés, nous irons à la plage, nous lirons dans un hamac, nous visiterons des petits sites moins connus, nous prendrons le pouls du Yucatan et c’est bien aussi 🙂
Je crois que tu as fait un très bon choix dans l’organisation de ce prochain voyage. Ça m’est arrivé aussi de devoir renoncer à certaines attractions et je ne l’ai pas regretté. On gagne au change ! 🙂
Je suis bien d’accord avec toi, Nathalie ! Ca ne sert à rien de visiter un lieu à toute vitesse, il vaut mieux prendre son temps. Nous avons prévu un voyage d’une semaine à Londres début mai et nous avons bien l’intention de profiter de ces vacances sans nous presser ! Bisous !
Less is more. On ne le dira jamais assez. Excellente idée pour Londres ! Dans cette ville où l’on peut facilement se laisser emporter par le tourbillon de sa vie trépidante, c’est bon de juste ralentir. Lors de mon dernier passage, j’ai ainsi pu la redécouvrir autrement, faisant de belles trouvailles comme les mews que je n’avais pas encore pris le temps de visiter. Il faut dire que certains sont bien cachés et tant mieux ! Bisous 🙂
Chère Nathalie, je ne peux qu’être enchantée par ton article qui résonne fort en moi.
Se raisonner et accepter de ne pas tout voir est un choix parfois difficile à faire, particulièrement pour les destinations lointaines qui ne seront sans jamais revues, mais je privilégie surtout de prendre le temps d’aller à la rencontre d’un pays, d’une ville.
Si on les survole, comment en percevoir l’âme ? J’aime tellement les voyages en train, où l’on se laisser aller à la rêverie en observant le paysage, confortablement installés. J’aime les périples en voiture, pour la liberté de s’arrêter où bon me semble et prendre des photos, aller à la rencontre des gens.
J’aime sortir des sentiers battus.
Et tout ce que tu dis en est la quintessence.
Merci pour ce très bel article !
Très heureuse que cet article te rejoigne, mais ça ne me surprend pas vu le nom de ton blog, si bien choisi. Tu as bien raison, on ne peut percevoir l’âme d’un lieu en seulement le survolant. Pour cela il faut prendre son temps, se limiter pour mieux approfondir.
C’est une très belle idée, si j’ai l’occasion je suivrais tes bons conseils
Bisous
Essaie, tu verras comme ça change tout ! Bisous
Je trouve ton article très beau et très vrai.. Comme les Matching, j’aurais tendance à dire que lorsqu’on voyage loin, on se dit qu’on n’y retournera pas, et que donc il faut en profiter pour découvrir un maximum de choses… J’aurais tendance à hyper planifier..Heureusement que mon Ours est là pour ménager des journées off durant nos périples pour laisser les choses venir à nous. et puis, nos enfants nous aident aussi à ralentir!
j’adore du coup ce mix de visites incontournables planifiées et d’opportunités offertes sous le coup de hasards paisibles..
Exactement ! À défaut de se priver de certaines visites, c’est bon de se laisser toujours une marge de manœuvre. C’est là qu’on découvre réellement un endroit à mon avis.
Personnellement c’est un mélange des deux. Je prévois des visites mais pas la journée entière et si un endroit me plait, j’y reste et tant pis pour la visite prévue.
Une adepte de visites incontournables planifiées et d’opportunités offertes au détour d’un centre historique ou d’un coin de nature…
C’est bon de se laisser toujours une marge de manœuvre, tu as raison !
C’est un bel article … qui me parle et comme tu es jeune, je te trouve encore plus sage d’être consciente de tout cela … bravo !!!
Merci Laurence, je m’approche déjà de la quarantaine tu sais, mais j’ai 20 ans dans la tête ! 😉
Je tombe sur cet article qui date un peu… Et je me dis que tu as tellement raison ! notre monde va trop vite. Je me retrouve tout à fait dans ce joli texte !
Merci Gaëlle. Il faut finalement aller à contre-courant de tout ce qu’on nous raconte. Pas facile de “désapprentissage”, mais il y a tellement de bienfaits. Finalement, c’est simple : s’écouter et se recentrer !